Après l’édition 2023 sur la Base aérienne 113 de Saint-Dizier, c’était au tour de la Base aérienne 133 de Nancy-Ochey d’accueillir le challenge Air Raid du 23 au 26 mai dernier. Cent-trente aviateurs de réserve et d’active ont testé leurs acquis militaires pendant trente-six heures de compétition.

 

AIR RAID 2024 photo 11

 

Depuis vingt-cinq ans, Air Raid est devenu un exercice annuel incontournable. Inscrit au livre bleu du programme des activités d’entraînement de l’armée de l’Air et de l’Espace, ce challenge permet de mettre en pratique le savoir-faire militaire des aviateurs et « de réunir les réservistes opérationnels et le personnel d’active afin de repousser leurs limites tout en démontrant l’unité et la solidarité qui caractérisent les forces armées » a souligné le Colonel Olivier FIX, Commandant de la Base aérienne 133 Nancy-Ochey lors de son mot d’accueil. Vingt-six équipes venues des différentes emprises aériennes françaises et du Service de santé des armées ainsi qu’une équipe de la Composante air belge ont participé au raid. Chacune était composée de quatre aviateurs unissant ainsi le personnel d’active et de réserve.

L’esprit d’audace des aviateurs mis à rude épreuve

Le thème de cette édition 2024 d’Air Raid était tout naturellement celui des quatre-vingt-dix ans de l’armée de l’Air et de l’Espace : l’esprit d’audace des aviateurs. Les participants ont dû en démontrer tant leurs aptitudes physiques, mentales et intellectuelles ont été challengées. Dès l’après-midi du vendredi 24 mai, la compétition a démarré par deux courses : la « laser run »AIR RAID 2024 photo 2 de cinq kilomètres avec un tir laser à l’issue puis la « space run », un enchaînement d’ateliers testant la rusticité, l’adresse et la résilience des raideurs.  Puis aux alentours de 22h30, les équipes se sont lancées de manière échelonnée à l’assaut de la marche de nuit. Plus de vingt kilomètres à arpenter les forêts de la Base aérienne 133 à l’aide d’une boussole et d’une carte.AIR RAID 2024 photo 3111 L’équipe belge s’est particulièrement illustrée durant cet exercice en terminant la course d’orientation nocturne dès 2h du matin. La journée du samedi était, quant à elle, consacrée à la réalisation d’ateliers séparés en deux pôles distincts. Le premier sur base : dix ateliers couvrant un large spectre des savoir-faire militaires. Un parcours d’obstacles, de l’air soft, de la reconnaissance NEDEX, du tir, du TIOR (technique d’intervention opérationnelle rapprochée), de la compréhension orale d’une écoute opérationnelle en anglais type JTAC, du sauvetage au combat, du franchissement de galeries souterraines... Le deuxième pôle d’ateliers se trouvait en dehors de la Base aérienne au Fort Pélissier.

AIR RAID 2024 photo 6

Cet ancien fort militaire perché sur un haut plateau abritait des épreuves faisant appel à l’adresse, la mémoire et au mental des participants comme la tyrolienne, le saut pendulaire de douze mètres de haut dans une fosse, le parcours plongé dans le noir dans les tréfonds de l’enceinte mais aussi des exercices testant les capacités de mémorisation des raideurs. Ce format a été apprécié par les concourants.

« On s’attendait à un raid classique mais la diversité des activités m’a surprise. Evidemment il faut avoir une bonne condition physique mais cela ne fait pas tout. Il y avait beaucoup d’épreuves faisant appel à notre connaissance de l’armée de l’Air et de l’Espace, à notre mémoire et à notre adresse » explique l’aviateur de deuxième classe de réserve Killian affecté sur la Base aérienne 705 de Tours.

 

Après l’effort vient le réconfort

La compétition a pris fin à 18h dans la journée du samedi 25 mai. Un diner conviant l’ensemble des raideurs et les encadrants de l’exercice était proposé dans la soirée. Le lendemain au matin, place à la cérémonie militaire commandée par le Général de brigade aérienne IMG 0591112Frédérick Devanlay, sous-directeur recrutement, réserves et jeunesse (SDRRJ) et Délégué aux réserves de l’armée de l’Air et de l’Espace (DRAAE), sur le taxiway des pistes de la Base aérienne 133. Dans son discours, le DRAAE a tenu à féliciter toutes les parties prenantes de l’exercice : les participants d’active et de réserve, les encadrants, le comité de pilotage d’Air Raid 2024 mais aussi toutes les unités de la base hôtesse mobilisées pour l’évènement (Service de Santé, service des sports, logistique, Gendarmes et Pompiers de l’Air, escadrons). « Votre engagement et votre volonté de dépassement s’inscrivent parfaitement dans les valeurs de cet exercice unique au sein duquel les aviateurs d’active et de réserve sont unis ». Il a ensuite présenté à l’assemblée l’ambitieux projet « Cap réserve Air 2030 » en lien avec l’objectif du doublement de la réserve opérationnelle. AIR RAID 2024 photo 7Est aussi intervenu le Général de brigade aérienne Arnaud Bourguignon, du CDAOA (Commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes) qui a rappelé la nécessité de faire appel à la réserve pour mener à bien les missions de l’armée de l’Air et de l’Espace. Rappelons qu’il avait lui-même accueilli l’édition 2019 d’Air Raid en tant que commandant de la Base aérienne 942 de Lyon-Mont Verdun.

A l’issue, les résultats de cette édition 2024 d’Air Raid ont été annoncés. C’est l’équipe numéro vingt-sept de la Base aérienne 942 de Lyon Mont-Verdun qui remporte la compétition avec un total de 920,30 points sur 1000 points possibles. L’équipe numéro huit (880,81 points) de l’Elément air de Drachenbronn, rattaché à la Base aérienne 133 de Nancy-Ochey et l’équipe numéro vingt-huit de la Base aérienne 942 de Lyon Mont-Verdun (879,1 points) complètent le podium.

Pour l’an prochain, direction la Base aérienne 107 de Villacoublay.

 

Texte : ASP M.DREHER / armée de l'Air et de l'Espace

Crédit photo : C.PERROTIN et E.REDONDO / armée de l'Air et de l'Espace

Créé en 1981 et implanté sur l’aéroport d’Angers Loire à Marcé (49140), Espace Air Passion s’enorgueillit d’être un musée vivant qui expose sur 3500 m² des avions, des planeurs ayant marqué l’histoire de l’aviation, certains très rares, voire uniques au monde. Quatre d’entre eux sont à ce jour classés monuments historiques. Ayant accueilli plus de 29500 visiteurs en 2023, le musée est un acteur touristique largement reconnu en Anjou avec un programme d’activités culturelles chaque année renouvelé. Le musée Espace Air Passion comprend trois salariés et environs 180 membres bénévoles au sein d’une association, Espace Air Passion - Groupement pour la Préservation du Patrimoine Aéronautique (GPPA) qui restaure, documente, maintient des savoir-faire anciens, et informe sur ces appareils historiques, riches de belles aventures humaines. 

 

Entrée principale Espace Air Passion1

 

Le musée a été sollicité en 2021 par l’Armée de l’Air et de l’Espace pour coopérer à la création d’une Escadrille Air Jeunesse à Angers, et celle-ci a été inaugurée en avril 2022 sur le tarmac d’Espace Air Passion. Aujourd’hui, cinq de ses membres sont réservistes citoyens qui prennent part à l’organisation et à l’animation des activités des équipiers aux côtés du référent et de réservistes opérationnels de la base aérienne 705 de Tours Cinq-Mars-La-Pile, et avec l’appui de bénévoles du musée qualifiés dans l’aéromodélisme, la mécanique et la menuiserie aéronautique.

Mission : transmettre

les 5 réservistes citoyens du musée Espace Air PassionTous les cinq, bénévoles dans différentes fonctions du musée, contribuent auprès des autres membres et des visiteurs au devoir de mémoire et au lien armée-nation. Ils mettent à la disposition de l’EAJ leur savoir-faire et leurs capacités relationnelles  pour renforcer l’épanouissement des jeunes dans leurs activités aéronautiques et patrimoniales, le lien armée-nation, et contribuer au devoir de mémoire et au rayonnement de l’Armée de l’Air et de l’Espace au sein de la société civile.

Jean-Marie et Dominique sont respectivement colonel et commandant en retraite et membres du conseil d’administration du musée. De part leur maintien et leur comportement, ils offrent par leur savoir-être une certaine image de ce que sont les militaires : des citoyens engagés et fidèles au service de leur pays. L’un est membre du réseau ADER, et l’autre s’occupe de la communication interne et externe du musée.

Les trois autres réservistes citoyens sont issus du monde civil, mais ont immédiatement adhéré et également conduit des actions au profit des jeunes de l’EAJ. François, ingénieur retraité, est aussi président du musée Espace Air Passion, Christian, pilote de ligne retraité, est le fondateur du musée et actuellement vice-président chargé du pôle documentation et archives. Tous les deux sont experts du patrimoine aéronautique auprès du ministère de la Culture. Enfin, Brigitte, gestionnaire de médias sociaux et traductrice indépendante, notamment pour l’Agence Spatiale Européenne (ESA), initie les jeunes au secteur spatial.

LEscadrille Air Jeunesse dAngers devant le BE 904Encadrés et soutenus par la base aérienne 705 de Tours Cinq-Mars-La-Pile, et profitant d’un cadre exceptionnel totalement complémentaire aux installations de la caserne Berthézenne du Génie d’Angers, les équipiers de l’EAJ d’Angers ont la chance d’évoluer dans un milieu remarquablement adapté aux objectifs visés. Outre les activités communes aux autres Escadrille Air Jeunesse, les équipiers ont la chance d’effectuer une approche du patrimoine aéronautique et font le lien entre les anciennes technologies, et celles du XXIème siècle. En 2023, ils ont pris part à la restauration et la remise en vol d’un aéronef historique de 1958 : le planeur Breguet 904 « Nymphale », avec un soutien financier de la Fondation des Ailes de France.

 

Crédit texte et photo : Musée Air Passion

Rives du lac de Cazaux, un matin du mois de décembre.

Les cygnes et les canards glissent tranquillement sur les eaux brumeuses qui bordent l’héliport face à un totem et un toucan qui campent devant l’entrée du CFSS (le Centre de formation à la survie et au sauvetage, prononcez « CF2S »), un centre de formation des armées unique en France.

Capture décran 155 min

Le rôle du CFSS ?

Dispenser des formations à la survie à tous les personnels navigants (PN) : les pilotes, les mécaniciens navigants, les personnels d’évacuation médicale, etc… Ils doivent apprendre à survivre en milieu hostile en attendant d’être évacués par des forces alliées en cas de crash. Les formations du CFSS suivent le processus OTAN, le cursus d’obtention des qualifications est un passage obligé.

Qu’y apprend-on ?

Tout d’abord les quatre règles essentielles à la survie : se protéger, se signaler, s’hydrater, se nourrir puis comment les mettre en œuvre lorsqu’on se retrouve en difficulté. Rien de mieux que la mise en application ! Les stagiaires se retrouvent rapidement sur le terrain pour restitution : communiquer à la radio, se cacher (de manière élaborée), s’extirper d’une carlingue immergée, d’un parachute, se construire un abri …

Apprendre à survivre c’est bien, apprendre à survivre sur tous les styles de terrains et sous tous les climats, c’est encore mieux ! Ainsi, le CFSS met ses stagiaires en immersions dans tous les milieux où les missions des armées françaises pourraient les mener : milieu terrestre, maritime, désertique, jungle équatoriale, sous climat tempéré ou temps froid et dans les conditions possibles de crash : temps de paix et temps de guerre, car forcément l’attente des secours ne se vivra pas de la même manière suivant le contexte.

Le CFSS dépend du Commandement des forces aériennes (CFA), le centre étant placé sous l’égide de la BFSA (Brigade des Forces Spéciales Air) et dénombre une quarantaine de membres, instructeurs pour la moitié. Beaucoup sont des commandos, passés par les plus prestigieuses unités de l’armée de l’Air et de l’Espace (AAE), mais aussi de la Marine Nationale (2) et de l’armée de Terre (1), mais il y a aussi trois sauveteurs-plongeurs.

Les stages nécessitant beaucoup de matériel, l’équipe compte également sept mécaniciens qui ont pour mission d’entretenir les bateaux et les véhicules et de reconditionner le matériel des équipements et paquetages, et il y en a ! Beaucoup ! Temps froid, zone sèche, zone humide… Cordes, parachutes, bottes chaudes, gants, combinaisons, canots de sauvetage…

L’équipe peut en plus compter sur trois réservistes : un sauveteur-plongeur (pour en savoir plus sur son parcours, c’est par ici), un instructeur survie et un réserviste dévolu à l’entretien du balisage.

« Il n’y a pas une semaine sans stage dans notre planning. Sur chaque stage un officier est responsable de la conduite. Quand on en a un en Guyane et un autre ailleurs, on est contents d’avoir un réserviste pour assurer la mission. » explique le lieutenant-colonel Alain, commandant du CFSS. Les réservistes apportent aussi un soutien bienvenu dans les spécialités déficitaires telles que celle des sauveteurs-plongeurs.

« Les réservistes sont des gens de valeur, il ne faut pas s’en priver, déclare le lieutenant-colonel Alain. Chez nous ils assurent beaucoup de missions et comblent le manque. Ils ont une expertise opérationnelle très utile et son employables immédiatement, clef en main, c’est un gros avantage ».

Mais reprenons notre narration. Comme toujours, le programme est chargée au CFSS. En cette semaine de fin d’année, deux stages se déroulent en simultané. Et ça tombe plutôt bien ! Un groupe du CPA30 (commandos parachutistes de l’air) est venu passer sa qualification CSAR (combat search and rescue), et une dizaine de PN de l’armée de Terre et de la Marine sont venus pour leur stage survie en zone de guerre. Les stagiaires campent donc leurs rôles respectifs dans une situation parfaitement réaliste : les premiers viennent secourir les seconds.

Avant de démarrer l’exercice de restitution, chacun se prépare.

Dans un hangar reculé de la BA120, Les instructeurs écoutent attentivement le briefing mission préparé par la dizaine d’opérateurs du CPA30. Objectif de la mission, point sur ressources humaines et matérielles, conditions météorologiques, moyens d’extraction, nombre de personnes à évacuer, fréquences de communications, description du terrain, de la population locale, cas non conformes, no gos (lignes rouges), les aborts (motifs pour lesquelles la mission serait annulée) … Tous les éléments nécessaires à l’exécution de la mission sont passés en revue sous l’oreille et l’œil attentifs des instructeurs du CFSS qui les débrieferont afin de les aider à perfectionner leurs présentations grâce à leur propre expérience des missions CSAR. Ce jour-là ils reviennent sur quelques données manquantes : la nuit est-elle claire ? sans lune ? Pourquoi ce choix d’échelle du quadrillage de la zone ? Pourquoi choisir tels points caractéristiques pour se guider de nuit ? Sont-ils sûrs qu’il n’y en a pas de plus facilement indentifiables ? Leur expérience du terrain, maintes fois éprouvée en conditions réelles est un enrichissement incontestable pour guider les stagiaires qui marcheront bientôt dans leurs pas.

Dans une salle d’instruction, de l’autre côté de la base, les PN stagiaires reçoivent les dernières recommandations du capitaine de réserve Totoche pour leur épreuve de Survie combat. L’ambiance est studieuse et très calme. Redoutent-ils les deux nuits et les deux jours qui les attendent dans la forêt landaise par un froid piquant et humide ? ou bien redoutent-ils leur potentielle capture ?

Pas le temps de leur poser la question, c’est l’heure du départ ! Direction les bois. Les PN sont répartis par binômes et déposés sur différentes localisations, dans la nuit. Ils doivent désormais rejoindre un point de rendez-vous et vivre selon les quatre règles de la survie en attendant leur extraction.

A la manœuvre : le capitaine, entouré d’une dizaine d’instructeurs, tous fusco (fusiliers commandos), aviateurs, marins et soldats, et comme toujours d’une infirmière et d’une auxiliaire sanitaire.

« Je suis le chef de stage. Je suis là pour superviser et prendre les décisions en cas de problème et aider les instructeurs si besoin ».  Ce qu’il ne dit pas, c’est que lors des missions en forêt c’est aussi le chef cuisinier de l’équipe ! Omelette garnie, crêpes… il dorlote son équipe ! On se dit qu’on a bien fait de venir.

Le capitaine Totoche encadre neuf à dix stages par an. Sa motivation principale ? « Je me suis dit que venir au CFSS permettrait de transmettre mes savoirs aux jeunes avant qu’ils partent sur le terrain. Ils ne connaissent pas l’épreuve du feu et ne la connaitront sans doute jamais, mais nous on a tellement de vécu opérationnel qu’on peut bien faire passer le message qu’il est important pour eux de bien tout assimiler car on sait ce qui les attend pour l’avoir vécu. » (Pour en savoir plus sur le capitaine et son parcours dans l’armée, c’est par ici)

Les CPA30 et les PN évoluent dans la forêt pendant deux nuit et un jour. L’équipe CFSS quant à elle assure les contacts radios prévus à heures fixes avec les commandos, inspecte les bivouacs et les trous des PN, vérifie que tous les stagiaires vont bien (froid, hydratation, blessures…). C’est surtout l’occasion de donner des recommandations et de débriefer sur leurs progressions.

Au matin nous sommes allés inspecter le bivouac des opérateurs du 30. Bon point : les abords étaient piégés au moyen de fumigènes, ils ont donc été alerté de notre approche et ont pu se préparer à l’éventualité d’une attaque. Moins bon point : ils n’étaient pas au rendez-vous pour le check radio quelques heures plus tôt. Problème technique. Le sergent Kevin et le commandant Richard on fait une pause dans l’exercice pour leur transmettre leurs remarques. Il est impératif de respecter les plages de transmission, cela ne doit pas se reproduire. Ils en profitent aussi pour leur donner des conseils d’amélioration sur la disposition des personnels sur le campement, afin que les opérateurs puissent mieux réagir pendant le reste du stage. Ces temps d’analyse permettent aux stagiaire de réagir et corriger le tir. Ils sont là pour apprendre, les instructeurs leurs dispenseront des conseils tout au long de la séquence.

Plus tard, nous avons accompagné le capitaine Totoche et l’adjudant-chef Maxence pour « débusquer » les PN Marine et Terre qui avaient pour mission de se créer des caches afin d’attendre le rendez-vous d’extraction sans être repérés. Trous, branchages, feuillages, souches, racines… Tous les moyens sont bons pour se fondre dans le paysage. Certains ont poussé l’exercice plus loin que d’autres : exploitation d’un trou naturel créé par le déracinement d’une souche ? Pas assez élaboré. Le marin est repéré immédiatement. Creuser un trou, planter des branches tout autour pour constituer un bosquet brise vue ? Bonne idée, beaucoup de travail, mais le rendu, peu naturel, a attiré notre regard. Se servir d’un amas de ronces existants et d’autres obstacles naturels pour rendre son trou difficilement visible et accessible ? Deux des pilotes de l’armée de Terre ont eu tout bon ! En revanche, on doute un peu quand ils nous affirment être confortablement installés pour y passer le reste de la journée et une bonne partie de la nuit !

Vient le matin du deuxième jour. Nous attendions un Caracal du Pyrénées pour une extraction des PN pour le CPA30 aussi vraie que nature, mais une mission prioritaire est tombée pour, évacuation par la route ce sera !

Les CPA arrivent au point de rendez-vous : FINEX.

Les PN sont capturés. Menottés et cagoulés ils sont ramenés sans qu’ils le sachent sur la base aérienne pour des séances d’interrogatoire. L’objectif de cette dernière phase de leur stage est de les confronter à la pression psychologique qui pourrait leur être imposée en cas de rapt. En tant que militaires français, ils seraient des cibles de choix, des sources de renseignement précieuses et des leviers de négociations prisés.

Ils réintègrent ensuite leurs unités marine et terre, plus riches d’une formation dispensée par l’armée de l’Air et de l’Espace qui pourrait un jour peut-être leur sauver la vie !

 

Texte et photo : E. Redondo, armée de l’Air et de l’Espace

Organisé par le Commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA), VOLFA est un exercice interalliés et interarmées de trois semaines mettant en œuvre une cinquantaine d’aéronefs. Ce rendez-vous annuel d’ampleur met l’accent sur toutes les dimensions du combat aérien et est une étape clé de l’entraînement des forces conventionnelles. 

Haute intensité, puissance aérienne, agilité et réactivité ont rythmé cette activité de préparation opérationnelle impliquant environ mille participants provenant d’unités embarquées sur différents types d’aéronefs (chasse, transport, hélicoptères), de techniciens, de commandos, d’opérateurs de défense sol-air et aussi en conduite de Centre de Détection et de Contrôle (CDC) depuis lesquels les missions aériennes seront orchestrées.

 

VOLFA24 2 lite

Au Centre de Détection et de Contrôle 04.930 Garonne, implanté sur la base aérienne 118 Colonel Rozanoff à Mont de Marsan, les contrôleurs s’affairent. La documentation est « releasée » depuis quelques jours et chacun doit s’enquérir des espaces aériens dédiés à l’exercice et qui seront activables au gré des missions et en coordination étroite avec l’aviation civile. Des documents plus spécifiques traitent des instructions du commandement de l’exercice et des procédures diverses liées aux télécommunications, nerf de la guerre d’une opération aérienne conjointe. En tout, ce sont plus de cent cinquante pages à assimiler dans un temps restreint et en langue anglaise, trois semaines d’exercice rythmées par les missions aériennes et leur Time Line imposée :

Task release :    DAY-1 // 07h00Z

PMiss* :            DAY-1 // 07h30Z escadron 2/30

Mass brief **:     DAY -1 // 14h30Z escadron 3/30

Mission :           DAY // 08h00Z – 10h00Z

Mass debrief :   12h30Z escadron 2/30

 

A cette occasion, le renfort de trois réservistes n’est pas de trop pour prêter main forte aux équipes de contrôleurs des opérations aériennes, aussi appelés GCI (Ground Controler Intercept). Tous trois majors, issus des forces, leur expérience respective des opérations aériennes et des exercices d’ampleur apporte une plus-value certaine pour la préparation du VOLFA 24 et sa gestion tactique en salle d’opération. D’autant plus que la transmission du savoir et la consolidation des méthodes de travail des plus jeunes est également l’un des objectifs de cet exercice de haute intensité. 

 

Major (R) Fabien.

Après quarante ans de carrière, dont trois mille heures de vol sur E-3F AWACS, le major de réserve Fabien est une référence dans le milieu confidentiel des GCI. Il a, grâce à son parcours, participé à de nombreux exercices et surtout de nombreuses missions de guerre. Il est néanmoins un « jeune » réserviste ayant rejoint les rangs des réserves Air depuis neuf mois seulement.

« Ma mission pour VOLFA est la juste continuité de mes fonctions précédentes ». En effet, le major est employé en tant que contrôleur tactique, mais aussi en tant que superviseur à un poste de direction. « C’est très gratifiant de pouvoir instruire les plus jeunes en formation et ainsi les aider à appréhender le déroulement d’une opération aérienne moderne ».

La difficulté, selon lui est de se sentir toujours « fit » en termes de connaissances et au niveau des automatismes indispensables à la tenue du poste. Cela demande une préparation mentale conséquente pour appréhender un tel exercice impliquant de nombreuses interactions, mais malgré tout « c’est comme le vélo, après une bonne journée dans l’ambiance, les réflexes reviennent. »

Son engagement dans la réserve, le Major Fabien le vit comme un prolongement de carrière, comme des moments intenses pour continuer à s’épanouir dans ce métier qui l’a passionné durant toute une vie.

Major (R) Pascal.

Le Major de réserve Pascal, dont la carrière a commencé il y a une quarantaine d’années également, précise qu’il est forcément un peu plus compliqué d’aborder ce type d’exercice en tant que réserviste, mais que les périodes de convocations réparties sur l’année permettent de garder un lien permanent avec le contrôle aérien tactique et de conserver ainsi les compétences requises. « Sur VOLFA nous sommes complétement intégrés dans la structure de l’exercice, nous retrouvons nos marques, et c’est toujours agréable de se retrouver dans une équipe que l’on connait, et côtoyer des équipages de navigants rencontrés durant la carrière. »

Il ajoute, sur le volet transmission du savoir, que « même si une cellule dédiée à l’instruction existe déjà, nous apportons une plu value avec notre expérience, notre manière de voir les choses, mais nous ne sommes plus là ni pour juger, ni pour évaluer des jeunes contrôleurs. Nous sommes là pour montrer et transmettre à la demande. »

Tout comme le Major Fabien, il s’accorde à dire que dans ce travail nul ne peut être un bon professionnel sans être passionné.

« C’est un métier où quarante ans après l’avoir commencé on continue à en apprendre tous les jours grâce aux échanges avec les pilotes, les autres contrôleurs, les lectures de nombreux documents à caractères aéronautiques qui évoluent régulièrement », conclue-t-il.

 VOLFA24 3 lite

Réserve et transmission en situation

Jour 5. Le major de réserve Fabien est aux côté d’un contrôleur en instruction afin de l’accompagner sur un volet exigeant de VOLFA 24 :

Après des décollages séquencés à la minute, les moteurs M88-2 des Rafale font trembler les fenêtres des bâtiments de la base aérienne 118. Ils vont rejoindre un tanker de type MRTT (multi role transport tanker), attendant sur zone ses receveurs. Quelques tonnes de carburant transférées en quelques minutes suffisent à donner à l’ensemble du package offensif l’endurance nécessaire à sa mission d’entrée sur un territoire « hostile ».

Les corridors créés pour l’exercice, permettent de relier 2 immenses zones de travail dans le ciel français. Un dispositif de seize chasseurs et un A400M pénètre l’espace aérien ennemi. Ce dernier, considéré comme un élément clé de la mission, est protégé par une patrouille de F-18 espagnols. L’A400M doit lui joindre un point spécifique en territoire ennemi pour y larguer des parachutistes des forces spéciales. Le reste des chasseurs a donc la mission de « nettoyer » l’espace de toute menace aérienne ou sol-air avant d’autoriser le « push » du transport sensible, bien plus lent que « les pointus ». 

Le contrôleur de ce package offensif doit diffuser en fréquence une « picture » représentant à chaque instant la position précise de la menace, tout en maintenant un haut niveau de sécurité aérienne pour les chasseurs entre eux, mais aussi pour chasseurs avec les avions civils qui passent à quelques kilomètres seulement des espaces fermés pour l’occasion, soit une distance de quelques secondes de vol. Pas de temps pour le hasard. Le major de réserve Fabien veille aux côtés de son poulain.

Outre le renfort apporté par les réservistes du Centre de Détection et de Contrôle 04.930 pour faire face à un tel événement, ces derniers ont à cœur de former une relève solide, ce qui est très gratifiant de leur point de vue. En effet, avoir sur sa fréquence de contrôle jusqu’à 30 appareils de combats qui exécutent une mission aérienne offensive au-delà des lignes ennemies, relève d’un savoir-faire qui n’est pas un sport de masse.

 

Ces trois réservistes répondront présent pour les dispositifs particuliers de sûreté aérienne (DPSA) prévus lors des jeux olympiques de Paris cet été.

 

 

Major (R) Michaël. 

* préparation de la mission

** briefing pour tous les participants

Du 5 au 12 aout à Breda aux Pays-Bas s’est tenu l’IJOLD (International Junior Officer Leadership Development), une session de formation commandement pour officiers subalternes de réserve des Armées de l’air des pays otaniens membres de l’IARS (International air reserve symposium).

Capture décran 156 min

Des réservistes des Armées de l’air de huit pays se sont réunis pour développer leurs compétences de commandement et pour se familiariser avec l’environnement interallié dans lequel ils peuvent être amenés à évoluer, tout comme leurs camarades d’active. Triés sur le volet, ils sont venus de France, d’Allemagne, du Royaume Uni, des Pays-Bas, du Danemark, de Norvège, du Canada et des Etats-Unis.

Les participants ont particulièrement apprécié la confrontation à des cultures et des modes de raisonnement différents. « Echanger avec des officiers de nations alliées, découvrir comment ils mènent leurs opérations, leur vision du commandement, c’est très enrichissant. » affirme le capitaine de réserve de l’US Air Force Erik.

Capture décran 157 minEn effet, les stagiaires ont pu mesurer leurs points de vues, leurs expériences, leurs acquis et réflexes culturels lors d’un escape game haletant qui vous embarque en pleine guerre froide, d’études de cas dans un établissement d’études géopolitiques à La Haye, et de plusieurs ateliers abordant des problématiques telles que savoir quand diriger et quand suivre, donner les bonnes consignes et les bons retours, faire face au management toxique ou encore à la résistance au changement.

Au-delà des échanges interculturels sur le leadership, l’IJOLD 2023 était un stage ponctué de nombreuses interventions de militaires hollandais de haut vol tels que « Dodo », une pilote d’hélicoptère ayant survécu au crash de son appareil en Afghanistan, des généraux ayant évolué au sein de l’OTAN et de l’ONU tel que les Commodores Foppen et Siemensma, ou encore l’aide de camp du roi. Tous ont partagé leur expérience inspirante et distillé des conseils précieux à la soixantaine de participants, leurs facilitateurs et l’équipe d’encadrement dans une atmosphère propice à l’échange informel, comme il en est coutume aux Pays-Bas.

« L’objectif était de fournir les bons outils, les bonnes clefs pour que chacun des réservistes puisse repartir chez lui fort de cela et soit en capacité de continuer à s’améliorer comme meneur grâce à ce socle de connaissances. Et nous savons que si nous nous recroisons à l’avenir dans un contexte international, nous saurons tous accorder nos violons », explique le lieutenant-colonel de réserve Giel, organisateur de l’IJOLD 2023.

Cette semaine hollandaise a aussi été l’occasion de visiter plusieurs institutions, musées et villes et de partir à la découverte de l’histoire des Pays-Bas.

Le major général Adang, commandant adjoint de l’Armée de l’air royale des Pays-Bas a conclu la semaine en affichant clairement les ambitions de cette formation d’exception pour les réservistes : « Notre équipe a mis au point un programme inspirant qui vous a fourni des outils et des éclairages qui vous serviront tout au long de votre carrière ».

ijold 4L’impression laissée au lieutenant de réserve Emma, l’un des deux réservistes français envoyés sur place, semble aller dans ce sens : « Ce que j’ai trouvé le plus passionnant, ça a été l’une des études de cas. Un cas de conscience pourrait-on dire. Avec notre groupe nous devions définir une stratégie face à une situation extrêmement délicate. Ce jour-là, il s’agissait du conflit entre serbes et bosniaques, une guerre qui nous parle à tous, militaires européens, car la plupart de nos chefs ont fait leurs armes en tant que jeunes lieutenants sur ce théâtre.

Extrait d’un film pour capturer un aperçu général de la situation, cartes à différentes échelles, contexte géopolitique et militaire, liste des ressources (eau, vivres, armes, munitions, véhicules, moyens de communications, pas de soutien extérieur…), moyens des ennemis en véhicules et en troupes … Ces éléments en main, il nous était demandé de nous mettre dans la peau des casques bleus hollandais, sur un site isolé et assiégé, confrontés à un dilemme militaire et moral. Il fallait faire un choix difficile qui mettait en péril la vie de 20 000 civils. Nous avons eu plusieurs heures pour étudier la situation et préparer notre solution, puis chacun des 8 groupes a présenté sa stratégie aux autres, mais surtout au général Matthijseen (Commandeur de la mission ONU Minusma : 14 000 militaires de 60 pays). Et c’est là que l’équipe d’organisation de l’IJOLD 2023 a fait fort ! Ce général de l’Armée de terre hollandaise n’était autre que le jeune capitaine qui, dans la réalité, il y a de ça presque 30 ans, a dû prendre cette décision. Mais ça nous ne l’avons su qu’au moment des présentations. Leçon magistrale. »

A l’heure où le chef d’état-major, le général Thierry Burkhard, enjoint tous les militaires français à « être des amplificateurs lorsque [vous planifiez ou participez] à des exercices bilatéraux dans le cadre de l’OTAN, de l’Union Européenne ou d’autres types de coalitions », la réserve répond présent.

Crédit texte : LTT (R) Emma.

Crédits photo : Marleen Groendendijk / Ilya de Milde